"une paire d’ailes aurait été très acceptable" : lettre de Nancy Storace (1816)


En 1816, au retour d’un séjour à Brighton, où elle a probablement été accompagnée de sa mère Elizabeth Storace, la cantatrice Nancy Storace répond à l’un de ses amis, le librettiste et homme de théâtre Thomas Dibdin :


Herne Hill Cottage, 30 octobre 1816

Cher Dibdin,

Je viens de lire votre faveur et vous congratule tous les deux pour la naissance d’un fils et héritier, pour lequel j’espère que vous aurez plus de chance qu’avec les autres. Je suis très heureuse de savoir que Mrs. D va si bien – transmettez-lui mon affection. Nous sommes arrivés de Brighton la nuit dernière – nous étions partis le matin – nous avons mis 12 heures avec nos propres chevaux. Ne trouve-vous pas que c’est fantastique ? Nous vous aurions assurément rendu visite, mais j’ai pensé que Mrs D devait être, soit au lit, soit près d’accoucher, et nous avons jugé que nous vous embarrasserions et que vous n’auriez pas de place pour nous – et ne faire que passer aurait été bien trop pour les chevaux en plus du trajet depuis Brighton – ou soyez sûr que nous ne serions jamais passé près de Betchforth sans rendre visite à nos amis. Durant le séjour de Mrs. Carey à Brighton nous nous attendions quotidiennement à vous voir – et alors nous aurions appris (de vous-même) si on pouvait arranger une visite durant notre voyage de retour.

Nous serons chez nous durant tout le mois de Novembre, et espérons vous voir. Nos lits sont toujours aérés aussi vous ne pouvez jamais arriver mal-à-propos.

Je suis navrée de ne pas avoir vu vos amis hier, mais évidemment, cela doit bien être nous qu’ils ont vus. Je suis surprise de ne pas avoir reconnu Mrs Charles Dibdin. Nous avons tâché de chercher votre cottage, et j’étais certaine de l’avoir vu. Je vous assure que nous étions désolés de rester 2 heures et demie à Reigate – si près – et de ne pas pouvoir vous voir. A ce moment-là, une paire d’ailes aurait été très acceptable.

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J’ai vu que votre [soirée à] Bénéfice était annoncée pour le 25 et je suis heureuse que la mort de cette pauvre Princesse ne l’empêche pas d’avoir lieu, car nous nous sommes assurés que cette soirée serait propice à un bénéfice.
Nous avons rendu visite à Mr. [Thomas] Harris à Brighton, qui fut suffisamment poli pour exprimer une grande satisfaction pour notre attention, et nous avons été très satisfaits de voir qu’il avait l’air beaucoup mieux. Vous savez qu’il a toujours été de nos favoris. Il semblait s’attendre de vous voir ici avant de retourner à Uxbridge.

Adieu, mon cher ami. Ma Mère, et même les serviteurs, se réjouissent de savoir que Mrs. D. aille si bien. Nous nous ajoutons tous deux pour vous transmettre nos respects. Br[…] est en ville, mais sera ravi d’apprendre (à son retour) que vous avez écrit.

Je vous prie d’agréer,
A S Storace

PS : le boucher attend la lettre.

Cette lettre est conservée dans les archives de Westminster (Westminster City Archives). Cette lettre avait été collectée par Alexander Meyrich Broadley (1847-1916) dans un recueil de memorabilia sur le théâtre de Haymarket, partiellement transcrit et accessible en ligne.


Thomas John Dibdin (1771-1841)


Thomas John Dibdin (1771-1841), dramaturge, acteur et manager de théâtre, était le fils illégitime de Charles Dibdin senior. Il avait écrit le livret de plusieurs opéras interprétés par Nancy Storace à Covent Garden, dont The Cabinet (1801) qui fut un immense succès.


Une variante de cette lettre est reproduite dans ses mémoires, The Reminiscences of Thomas Dibdin: Of the Theatres Royal Covent Garden, Drury Lane, Haymarket,...

 lettre de Nancy Storace 1816

lettre de Nancy Storace 1816
 

Mrs. Charles Dibdin est Mary Bates, l’épouse de Charles Dibdin junior, frère de Thomas.

Mr. [Thomas] Harris (?-1820), le propriétaire du théâtre de Covent Garden, ancien employeur de Nancy Storace entre 1801 et 1805. Il avait une demeure à Uxbridge, Belmont House, qui fut mise en vente en 1820.

description de Belmont House 1820

Description de la maison de Th. Harris dans



Il serait curieux que « Br…. » soit John Braham, car en octobre 1816, les deux anciens amants étaient définitivement brouillés, après leur séparation acrimonieuse du début de l’année 1816…



Cette lettre de Nancy Storace est évoquée à la
page 342 de la biographie de Nancy Storace,
par Emmanuelle Pesqué.

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